TU ES PIERRE ET SUR CETTE PIERRE JE BÂTIRAI MON EGLISE

 

 

 

DOMINUS IESUS
II

ANNEXE I

Genre littéraire et degré d'autorité de la Déclaration Dominus Iesus

Lors de la conférence de presse du 5 septembre au cours de laquelle a été rendue publique la Déclaration Dominus Iesus sur l'unicité et l'universalité salvifique de Jésus-Christ et de l'Église, Mgr Tarcisio Bertone, secrétaire de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a expliqué quel était le genre littéraire de ce texte et en a précisé le degré d'autorité.

1. Le genre littéraire

Il s'agit d'une Déclaration de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Le mot de déclaration signifie que le document n'enseigne pas des doctrines nouvelles qui découleraient du développement et de l'explicitation de la foi, mais qu'il réaffirme et résume la doctrine de la foi catholique définie ou enseignée dans des documents antérieurs du Magistère de l'Église, en en indiquant l'interprétation exacte en raison d'erreurs et d'ambiguïtés doctrinales diffuses dans le milieu théologique et ecclésial aujourd'hui. Comme le rappelle explicitement son introduction, ce document n'a pas la prétention de traiter d'une manière organique et systématique toute la problématique relative aux thèmes christologiques et ecclésiologiques exposés ; il ne se substitue donc pas à la tâche de la théologie et il n'entend pas freiner l'effort des théologiens pour donner des réponses à des questions jusqu'à maintenant peu étudiées. La déclaration, au contraire, encourage ces études en en indiquant toutefois la direction et les limites à ne pas franchir pour ne pas s'égarer et tomber dans l'erreur. Direction et limites posées par la Révélation elle-même de la vérité de Dieu accomplie en Jésus Christ, transmise par la Sainte Écriture et la Tradition vivante de l'Église interprétée authentiquement par le Magistère. S'agissant d'un document doctrinal de la Congrégation pour la doctrine de la Foi, expressément approuvé par le Saint-Père, il est de nature magistérielle universelle.

Cette particularité découle du fait que la Congrégation pour la doctrine de la Foi est l'organisme chargé d'aider le Saint-Père qui lui a confié le mandat spécifique et unique de promouvoir et de garder dans tout l'univers catholique la doctrine sur la foi et les mœurs (cf. Constitution apostolique Pastor Bonus, art. 48). C'est pourquoi les documents de la Congrégation pour la doctrine de la Foi, expressément approuvés par le Pape participent du magistère ordinaire du Souverain Pontife (cf. Instruction Donum Veritatis, 18). Il est bon de rappeler que ces documents de nature doctrinale ne sont pas comparables à des actes de nature administrative ou seulement juridictionnelle, mais qu'ils sont des actes d'enseignement magistériel, étant donné le rapport étroit et essentiel que les membres de la Congrégation pour la doctrine de la Foi ont avec le Titulaire suprême de la charge de Pierre, qui a une responsabilité unique et très particulière pour l'Église universelle dans le domaine du pouvoir magistériel.

Si l'on niait que les décisions doctrinales de la Congrégation approuvées expressément par le Pape sont d'une nature magistérielle universelle, il s'ensuivrait que de telles décisions auraient seulement valeur d'orientation ou de discipline ou encore équivaudraient à une opinion théologique même respectable. Cela contredit la Tradition ecclésiale ainsi que la volonté ou le mandat du Souverain Pontife lui-même.

C'est pour cette raison que le présent document, bien qu'il ne soit pas un acte propre du Magistère du Souverain Pontife, reflète toutefois sa pensée puisqu'il a été explicitement approuvé et confirmé par le pape qui a voulu que ce qu'il contient soit reçu par toute l'Église puisque c'est lui qui en a ordonné la publication.

La formule d'approbation qui se trouve à la fin du document est d'une autorité spéciale et élevée : circa scientia et apostolica Sua auctoritate. Cela correspond à l'importance et au caractère essentiel des contenus doctrinaux enseignés dans la déclaration : il s'agit de vérités de foi divine et catholique (qui appartiennent à la première catégorie de la Formule de la profession de Foi) ou de vérités de la doctrine catholique à tenir fermement (qui appartiennent à la deuxième catégorie de cette même Formule).

L'assentiment requis des fidèles a donc un caractère définitif et irrévocable. Afin d'écarter tout éventuelle équivoque, il faut préciser que la formule d'appropriation employée par le Souverain Pontife qui exprime certainement un sommet dans l'approbation du document et qui reprend littéralement les expressions bien connues employées par les Pontifes romains dans le passé n'affaiblit ni atténue en aucune manière la valeur des autres documents jusqu'à présent publiés par la Congrégation pour la doctrine de la Foi approuvés expressément par le Pape. Si d'un côté, en fait, tous les documents doctrinaux de la Congrégation pour la doctrine de la Foi, pour avoir une autorité magistérielle doivent être approuvés expressément par le Pape, d'un autre côté, cette approbation expresse peut être exprimée par des formules différentes plus ou moins accentuées, compte tenu surtout de l'objet et de l'ordre différent ou du type des catégories de vérités contenues dans les documents eux-mêmes.

2. Le degré d'autorité

Il est nécessaire de faire un point précis sur le degré d'autorité de la Déclaration Dominus Iesus en raison, en particulier, de l'insistance avec laquelle — même récemment — les interventions et les publications de certains théologiens ont émis des critiques au sujet du Motu proprio du Saint-Père Ad tuendam fidem et de la Note doctrinale illustrant la formule conclusive de la Profession de Foi publiée par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi en 1998.

L'objection concerne la distinction présumée entre l'infaillibilité et le caractère définitif de la doctrine. Selon certains la Note doctrinale de la CDF affirmerait que le Magistère peut proposer comme définitives des doctrines qui ne sont pas enseignées infailliblement.

On en tire la conclusion que, du fait que ces doctrines ne sont pas infaillibles, elles pourraient être considérées comme provisoires ou sujettes à révision et donc objet de discussion de la part des théologiens.

Cette objection et sa conclusion sont totalement dénuées de fondement et de motif. Si une doctrine est enseignée comme définitive et donc irréformable, cela présuppose qu'elle ait été enseignée par un acte infaillible du Magistère, même si d'un type différent. Le vrai problème est autre : une doctrine peut être enseignée par le Magistère comme définitive soit par un acte solennel de définition (par le pape ex cathedra et par le Concile œcuménique) soit par un acte ordinaire non solennel (par le Magistère ordinaire et universel du Pape et des évêques en communion avec lui). Dans les deux cas toutefois ces actes sont infaillibles.

Il est en outre possible que le Magistère du Pape confirme ou réaffirme des doctrines qui appartiennent d'ailleurs à la Foi de l'Église : dans ce cas, la sentence du Pape, bien qu'elle n'ait pas le caractère d'une définition solennelle propose à nouveau à l'Église des doctrines infailliblement enseignées comme devant être crues ou tenues définitivement ; elle exige donc de la part des fidèles un assentiment de foi ou définitif.

Dans le cas de la déclaration Dominus Iesus, on doit dire qu'elle reste un document de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi qui ne jouit donc pas de la prérogative de l'infaillibilité en tant qu'elle émane d'un organisme inférieur au Pape et au collège des évêques en communion avec le Pape. Toutefois, les enseignements des vérités de foi et de la doctrine catholique qu'elle contient exigent de la part de tous les fidèles un assentiment définitif et irrévocable, non en raison et à partir de la publication de la Déclaration, mais en tant qu'ils appartiennent au patrimoine de foi de l'Église et qu'ils ont été infailliblement proposés par le Magistère dans des actes et des documents antérieurs.

La Déclaration se présente donc, selon sa nature propre comme un service de la foi, soit pour la sauvegarde d'erreurs et d'ambiguïtés qui obscurcissent ou même altèrent des points essentiels de son patrimoine originel, comme le mystère de l'unicité et de l'universalité salvifique du Christ et le mystère de l'unité et de l'universalité de l'Église sacrement universel du salut, soit pour promouvoir une compréhension plus approfondie dans la fidélité et dans la continuité avec la Tradition ecclésiale. Un tel service qui est exactement l'opposé d'une limitation ou d'un étouffement de la recherche théologique, ouvre l'intelligence des croyants en la délivrant du risque de déviation et de partialité pour la ramener dans la juste direction vers la compréhension de la plénitude de la Révélation divine. Dans ce sens, la déclaration est un service de charité, de cette charité qu'Antonio Rosmini appelait la « charité intellectuelle », parce que le salut des âmes (salus animarum), qui pour l'Église, vaut plus que tout autre chose exige comme condition essentielle l'annonce et la défense de la vérité de foi.

Du 25 au 28 janvier 2000, s'est tenue à Rome l'Assemblée plénière annuelle de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Jean Paul II, en recevant les participants à la fin de leurs travaux a prononcé un important discours qui traitait déjà de l'unicité et de l'universalité salvifique du Christ et de l'Église.

Dans ce document le Pape a expliqué : « La thèse relative au caractère limité de la Révélation du Christ, qui trouverait son complément dans les autres religions, est donc contraire à la foi de l'Église ».

ANNEXE II

Dominus Iesus

Synthèse de la Déclaration
sur l’unicité et l’universalité salvifique de Jésus Christ
et de l’Église

Introduction

Dans le vif débat contemporain sur le rapport entre le christianisme et les autres religions, certains théologiens catholiques affirment que toutes les religions sont également valides comme moyen de salut. Il s’agit de théories relativistes qui refusent ou retiennent comme dépassées des vérités fondamentales pour la foi catholique sur le caractère définitif et complet de la révélation de Jésus, l’inspiration des livres de la Sainte Écriture, l’indivisible unité personnelle entre le Verbe éternel et Jésus de Nazareth, l’unité de l’économie du Verbe incarné et du Saint-Esprit, l’unicité et l’universalité salvifique du mystère de l’incarnation, de la passion et de la mort de Notre Seigneur Jésus Christ, la médiation salvifique universelle de l’Église, la non-séparation (quoique dans la distinction) entre le Royaume de Dieu, le Royaume du Christ et l’Église, la subsistance de l’unique Église du Christ dans l’Église catholique.

Ces théories s’appuient sur certains présupposés de nature philosophique ou théologique. La Déclaration en signale quelques-uns comme par exemple la conviction que la vérité sur Dieu est insaisissable et ineffable, même par la révélation chrétienne ; l’attitude relativiste vis-à-vis de la vérité, entraînant que ce qui est vrai pour certains ne le serait pas pour d’autres ; l’opposition radicale qu’on établit entre la mentalité logique occidentale et la mentalité symbolique orientale ; le subjectivisme exaspéré qui tient la raison comme seule source de connaissance ; la privation du mystère de l’incarnation de sa dimension métaphysique ; l'éclectisme qui, dans la recherche théologique, prend des idées dans différents contextes philosophiques et religieux, sans se soucier ni de leur cohérence systématique ni de leur compatibilité avec la vérité chrétienne ; la tendance finalement à lire et à interpréter la Sainte Écriture en dehors de la tradition et du magistère de l’Église.

Tenant compte de ce débat, la Commission théologique internationale avait déjà publié en 1997 un document : Le Christianisme et les religions. En s’appuyant sur de nombreuses références bibliques et réflexions théologiques, on y montrait que la théologie pluraliste des religions n’a pas de fondement, et on y réitérait l’annonce de l’unicité et de l’universalité salvifique de Jésus Christ et de l’Église, toujours source du salut, à l’intérieur comme hors du christianisme. Cependant, à cause de la diffusion rapide et massive d’une mentalité relativiste empreinte d’un pluralisme mal compris, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi intervient maintenant avec la présente Déclaration pour proclamer à nouveau et éclairer certaines vérités de foi, en suivant ici l’exemple de l’apôtre Paul face aux Corinthiens : « Je vous ai donc transmis en premier lieu ce que j’avais moi-même reçu » (1 Co 15, 3).

Concrètement, la Déclaration compte six points, qui résument les données essentielles de la doctrine de la foi catholique sur la signification et la valeur salvifique des autres religions.

I. La révélation de Jésus Christ, complète et définitive

Contre la thèse qui soutient le caractère limité, incomplet et imparfait de la révélation de Jésus Christ, qui compléterait la révélation présente dans les autres religions, la Déclaration rappelle la foi catholique sur la révélation complète et définitive en Jésus Christ du mystère salvifique de Dieu. Jésus étant vraiment Dieu et vraiment homme, ses mots et ses œuvres portent en eux le caractère total et définitif de la révélation du mystère de Dieu, qui demeure cependant en lui-même transcendant et inépuisable. Par conséquent, tout en admettant que les autres religions apportent souvent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes (Déclaration Nostra ætate, n. 2), on réaffirme que la qualification de textes inspirés ne doit être réservée qu’aux livres canoniques de l’Ancien Testament, qui, en tant qu’inspirés par le Saint-Esprit, ont Dieu pour auteur et enseignent fermement, fidèlement et sans erreur la vérité sur Dieu et sur le salut de l’humanité. La Déclaration enseigne par ailleurs qu’on doit tenir fermement la distinction entre la foi théologique, qui est l’accueil de la vérité révélée par le Dieu Un et Trine, et la croyance dans les autres religions, qui est une expérience religieuse encore à la recherche de la vérité absolue, et encore privée de l’assentiment à Dieu qui se révèle.

II. Le Logos incarné et le Saint-Esprit dans l’œuvre du salut

Contre la thèse d’une double économie salvifique, une économie du Verbe éternel, universelle et donc également valide en dehors de l’Église, et une économie du Verbe incarné, limitée aux seuls chrétiens, la Déclaration réaffirme l’unicité de l’économie salvifique du seul Verbe incarné qui est Jésus Christ, Fils unique du Père. Le mystère de son incarnation, de sa mort et de sa résurrection est la source unique et universelle de salut pour l’humanité entière. Le mystère du Christ en effet a une unité intrinsèque, de l’élection éternelle en Dieu jusqu’à la parousie : « [Le Père] nous a élus en lui [le Christ], dès avant la fondation du monde » (Ep 1, 4).

Jésus Christ est le médiateur et rédempteur universel. Est donc aussi erronée l’hypothèse d’une économie salvifique de l’Esprit saint au caractère plus universel que celle du Verbe incarné, crucifié et ressuscité. Le Saint-Esprit est en effet l’Esprit du Christ ressuscité et n’agit pas à côté ou en dehors du Christ. Il n’y a qu’une seule économie trinitaire, voulue par le Père, et réalisée dans le mystère du Christ avec la coopération du Saint-Esprit.

III. Unicité et universalité du mystère salvifique de Jésus Christ

La Déclaration réaffirme par conséquent l’unicité et l’universalité salvifique du mystère de Jésus Christ, qui par son incarnation, sa mort et sa résurrection a accompli l’histoire du salut, dont il est la plénitude, le centre et la source. Certes, l’unique médiation du Christ n’exclut pas des médiations participées, de types et d’ordres divers, mais elles tirent leur sens et leur valeur uniquement de celle du Christ, et elles ne peuvent être considérées comme parallèles ou complémentaires. Les solutions qui envisageraient une action salvifique de Dieu hors de l’unique médiation du Christ seraient contraires à la foi catholique.

IV. Unicité et unité de l’Église

La présence et l’œuvre de salut du Seigneur Jésus continuent en effet dans l’Église et à travers l’Église qui est son Corps. Et comme la tête et les membres d’un corps vivant sont inséparables mais distincts, le Christ et l’Église ne peuvent être ni confondus ni séparés.

Par conséquent, compte tenu de l’unicité et de l’universalité de la médiation salvifique de Jésus Christ, on doit croire fermement comme vérité de foi catholique en l’unicité de l’Église fondée par le Christ. Les fidèles sont tenus de professer qu’il existe une continuité historique entre l’Église instituée par le Christ et l’Église catholique. En effet, cette unique Église du Christ, « c’est dans l’Église catholique qu’elle se trouve, gouvernée par le successeur de Pierre et les évêques qui sont en communion avec lui » (Constitution dogmatique Lumen gentium, n. 8). En ce qui concerne les « éléments nombreux de sanctification et de vérité qui subsistent hors de ses structures » (ibidem), c’est-à-dire dans les Églises et communautés ecclésiales qui ne sont pas encore en pleine communion avec l’Église catholique, il faut affirmer que leur « force dérive de la plénitude de grâce et de vérité qui a été confiée à l’Église catholique » (Déclaration Unitatis redintegratio, n. 3).

Les Églises qui n’acceptent pas la doctrine catholique du primat de l’évêque de Rome, restent unies à l’Église catholique par des liens très étroits comme la succession apostolique et l’Eucharistie valide. Par conséquent, l’Église du Christ est présente et agissante dans ces Églises particulières, malgré l’absence de la pleine communion avec l’Église catholique. En revanche, les communautés ecclésiales qui n’ont pas conservé l’épiscopat valide et la substance authentique et intégrale du mystère eucharistique, ne sont pas des Églises au sens propre ; toutefois, les baptisés de ces Communautés se trouvent dans une certaine communion bien qu’imparfaite avec l’Église catholique. « En conséquence, ces Églises et communautés séparées, bien que nous les croyions souffrir de déficiences, ne sont nullement dépourvues de signification et de valeur dans le mystère du salut » (Déclaration Unitatis redintegratio, n. 3).

V. Église, Royaume de Dieu et royaume du Christ

La mission de l’Église est « d’annoncer le Royaume du Christ et de Dieu et de l’instaurer dans toutes les nations, formant de ce Royaume le germe et le commencement sur la terre » (Constitution dogmatique Lumen gentium, n. 5). D’un côté, l’Église est « le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain » (ibidem, n. 1). Elle est donc signe et instrument du Royaume : appelée à l’annoncer et à l’instaurer. De l’autre côté, l’Église est le « peuple qui tire son unité de l’unité du Père et du Fils et de l’Esprit Saint » (ibidem, n. 4) ; elle est ainsi « le règne du Christ déjà mystérieusement présent » (ibidem, n. 3), puisqu’elle en constitue le germe et le principe. Diverses explications théologiques peuvent exister sur ces problèmes. Cependant, aucune de ces explications possibles ne doit refuser ou réduire à néant le lien étroit entre le Christ, le Royaume et l’Église. En effet, le « Royaume de Dieu tel que nous le connaissons par la Révélation » ne peut être séparé « ni du Christ ni de l’Église » (Encyclique Redemptoris missio, n. 18).

Le Royaume de Dieu ne s’identifie cependant pas avec l’Église dans sa réalité visible et sociale. Car on ne doit pas oublier « l’action du Christ et de l’Esprit saint hors des limites visibles de l’Église » (ibidem). En considérant les rapports entre le Royaume de Dieu, le Royaume du Christ et l’Église, il est de toute manière nécessaire d’éviter des formulations unilatérales comme celles qui, pour parler du Royaume, gardent le silence sur le Christ, privilégient le mystère de la création mais se taisent sur le mystère de la rédemption parce que — dit-on — le Christ ne peut être compris par ceux qui n’ont pas la foi chrétienne, alors que les peuples, les cultures et les diverses religions peuvent se rencontrer autour de l’unique réalité divine, quel que soit son nom. Le Royaume tel qu’elles l’entendent, finit par marginaliser ou sous-estimer l’Église. Ces thèses nient pratiquement l’unicité du rapport du Christ et de l’Église avec le Royaume de Dieu.

VI. L’Église et les religions face au salut

Ce qui a été jusqu’ici rappelé impose nécessairement des étapes au chemin que la théologie doit parcourir pour élucider le rapport de l’Église et des religions non chrétiennes avec le salut. On doit avant tout croire fermement que l’« Église en marche sur la terre est nécessaire au salut. Seul en effet, le Christ est médiateur et voie de salut : or, il nous devient présent en son Corps qui est l’Église » (Constitution dogmatique Lumen gentium, n. 14). Cette doctrine ne doit pas être opposée à la volonté salvifique universelle de Dieu ; aussi, « il est nécessaire de tenir ensemble ces deux vérités, à savoir la possibilité réelle du salut dans le Christ pour tous les hommes et la nécessité de l’Église pour le salut » (Encyclique Redemptoris missio, n. 9). Pour ceux qui ne sont pas formellement membres de l’Église, « le salut du Christ est accessible en vertu d’une grâce qui, tout en ayant une relation mystérieuse avec l’Église, ne les y introduit pas formellement mais les éclaire d’une manière adaptée à leur état d’esprit et à leur cadre de vie. Cette grâce vient du Christ, elle est le fruit de son sacrifice et elle est communiquée par l’Esprit Saint » (ibidem, n. 10).

Sur la modalité de transmission aux non-chrétiens de la grâce salvifique de Dieu, le concile Vatican II s’est contenté d’affirmer que Dieu la donne « par des voies connues de lui » (Déclaration Ad gentes, n. 7). La théologie cherche à approfondir cette idée. Cependant, il serait clairement contraire à la foi catholique de considérer l’Église comme un chemin de salut parmi d’autres.

Certes, les différentes traditions religieuses contiennent et proposent des éléments de religiosité qui font partie de « ce que l’Esprit fait dans le cœur des hommes et dans l’histoire des peuples, dans les cultures et les religions » (Encyclique Redemptoris missio, n. 29). On ne peut cependant leur attribuer l’origine divine et l’efficacité salvifique ex opere operato qui sont propres aux sacrements chrétiens. Par ailleurs, on ne peut ignorer que d’autres rites naissent de superstitions ou d’erreurs semblables (1 Co 10, 20-21) et constituent plutôt un obstacle au salut.

Avec l’avènement de Jésus Christ sauveur, Dieu a voulu que l’Église par lui fondée fût l’instrument du salut de toute l’humanité. Cette vérité de foi n’enlève rien à la considération respectueuse et sincère de l’Église pour les religions du monde, mais en même temps, elle exclut radicalement la mentalité indifférentiste « imprégnée d’un relativisme religieux qui porte à considérer que “toutes les religions se valent” » (Encyclique Redemptoris missio, n. 36). Comme exigence d’amour pour tous les hommes, l’Église « annonce, et est tenue d’annoncer sans cesse, le Christ qui “est la voie, la vérité et la vie” (Jn 14, 6), dans lequel les hommes doivent trouver la plénitude de la vie religieuse et dans lequel Dieu s’est réconcilié toutes choses » (Déclaration Nostra ætate, n. 2).

Conclusion

La présente Déclaration a voulu proclamer à nouveau et éclairer certaines vérités de foi vis-à-vis de certaines propositions problématiques voire même erronées.

À propos de la vraie religion, les pères du concile Vatican II ont affirmé : « Cette unique et vraie religion, nous croyons qu’elle subsiste dans l’Église catholique et apostolique à qui le Seigneur Jésus a confié le mandat de la faire connaître à tous les hommes, lorsqu’il dit aux apôtres : “Allez, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit” (Mt 28, 19-20). Tous les hommes, d’autre part, sont tenus de chercher la vérité, surtout en ce qui concerne Dieu et son Église ; et quand ils l’ont connues, de l’embrasser et de lui être fidèles » (Déclaration Dignitatis humanæ, n. 1).

 

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